Tisseurs de Sorts : Ensorceleurs en série ! (2024)

La haine ou un sort ?!

Tisseurs de Sorts: Ensorceleurs en série! (1)

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Tisseurs de Sorts: Ensorceleurs en série! (3)

Désormais bien installée dans le paysage jeunesse français, l’autrice britannique Frances Hardinge nous revient pour une nouvelle incursion dans les terres de l’imaginaire. Cette fois pourtant, point de fantastique comme dans son excellent Chant du Coucou.
L’Anglaise choisit de s’aventurer dans un monde fantasy de son cru, au pays de Raddith où les sorts peuvent s’abattre sur vous sans crier gare (ou presque). Embarquez pour Mizzleport et prenez garde aux Sauvages, sous peine de finir à l’Hôpital Rouge et de ne jamais en sortir…

« Les puissants de ce monde ne disent jamais rien d’original, dès qu’on cesse de leur témoigner la déférence qu’ils exigent. Dans leur indignation, ils débitent tous les mêmes répliques. »

Le prologue de Tisseurs de Sort pose le cadre. Nous voici sur un continent inconnu dans le pays de Raddith. Sous la coupe de la Chancellerie — un groupement de riches marchants et négociants — les habitants doivent composer avec d’étranges créatures appelées « Petit* frères », des sortes d’araignées vivant dans les régions inhospitalières le long des côtes.
Ces bestioles ont la fâcheuse tendance d’offrir à ceux qui ont la haine la capacité à ensorceler l’objet de leur ressentiment, ce qui crée naturellement tout un tas de problèmes pour Raddith et son gouvernement. Si un Pacte a été conclu entre les araignées et la Chancellerie, cela n’empêche pas les victimes des ensorceleurs d’augmenter jour après jour, expliquant que certains petit* malins ont monté tout un business pour désensorceler l’être aimé. Kellen est l’un de ces désensorceleurs et sa réputation ne cesse de grandir. Accompagné par la jeune Nettle, ancienne victime sauvée par les talents de Kellen, le jeune garçon se voit recruté par un étrange cavalier qui travaille pour une dignitaire de Mizzleport et qui pense dur comme fer qu’une organisation instrumentalise les Ensorceleurs pour s’emparer du pouvoir. Commence alors une aventure qui va mener Nettle et Kellen àtravers les Marais et les Sauvages pour comprendre les dessous d’une machination qui dépasse de loin ce qu’il avait pu imaginer.
Frances Hardinge n’a pas peur des défis et elle nous livre ainsi un univers à la fois riche et complexe où tout n’est pas si tranché que cela peut y paraître de prime abord. Au fur et à mesure de leur voyage et des différentes péripéties du récit, le lecteur va comprendre que les ensorcelés sont autant victimes que coupables et qu’il est même parfois bien difficile de trancher entre les deux. Ce qui fait la force de Tisseurs des Sorts, c’est de filer une métaphore à propos de la haine et de ce qu’elle fait faire aux hommes.

« La souffrance obéit à ses propres lois, dit simplement Rue. Nous ne choisissons pas ce qui nous déchire. Aucun sentiment n’est répréhensible. »

Mais avant d’être un roman sur la haine, Tisseurs de Sorts s’intéresse à l’amour et l’amitié. Notamment par la relation entre Nettle et Kellen, mais aussi à travers les multiples rencontres des deux comparses qui vont devoir démêler les fils de la responsabilité tout en trouvant des soutiens inattendus et d’intenses moments de solidarité. L’autre magnifique trait d’union dans le roman de Frances Hardinge, c’est bien évidemment tout ce qui gravite autour de Nettle et de son frère-mouette, Yannick, lui qui a choisi de rester ensorcelé mais qui ne peut se résoudre à abandonner sa sœur peu importe les périls ou les dangers encourus.
Pour épaissir son récit, Hardinge imagine une myriade de créatures fantastiques qui auront toutes un rôle à jouer à un moment ou un autre. Des mystérieux Porteurs de livres qui vous établissent des contrats magiques à ne surtout pas trahir aux Petit* frères et leurs sorts implacables en passant par les sinistres Chevaux des marais amateurs de viande fraîche.
Frances Hardinge sait mêler sinistre et merveilleux dans un même mouvement, jouant sur le grand frisson autant que sur la fascination.
Plusieurs moments de bravoure viennent émailler le récit mais c’est avant tout la réflexion qui est menée sur la façon de punir ceux qui ont la haine qui permet au roman de se distinguer.
Tout du long, l’autrice s’interroge sur ce qui fait qu’un ensorceleur passe à l’action, sur ce qui conduit quelqu’un à faire s’abattre une terrible malédiction sur une autre personne. Peut-on se tromper de colère ? Peut-on être légitime quant à la rage que l’on ressent ?
Tisseurs de Sorts n’est pas un récit de justice ou de revanche, c’est un roman plein d’humanité avec toute l’ambiguité et les erreurs que cela présuppose. Celui qui se rend responsable d’un crime doit-il vraiment être enfermé à vie ou maltraité en conséquence ?
En somme, doit-on répondre à la haine par la haine ?
La réponse est bien loin d’être évidente et les déchirements moraux vécus par les personnages seront autant de pierres pour que le jeune lecteur puisse construire lui-même son raisonnement final.
Malheureusem*nt, le problème de Tisseurs de Sorts ne réside ni dans sa qualité d’écriture, ni dans ses personnages, ni dans son univers.
Avec ses 550 pages bien tassées, ce petit pavé souffre de longueurs parfois éprouvantes. On pense au passage avec Blanche Mauve qui pourrait presque constituer une aventure à part ou au détour chez le Charpentier qui semble assez artificiel alors que le dénouement final approche pourtant à grand pas. Frances Hardinge tire à la ligne et le récit déçoit par une lenteur par trop évidente alors qu’il gagnerait justement à l’emballement et à la concision. On assiste davantage à un empilement d’enquêtes pour faire gonfler l’aventure principale…et c’est bien dommage car l’ensemble reste globalement d’excellente tenue.

« Nous sommes tous des enfants, quand il s’agit de nos ensorceleurs. Ce sont nos croque-mitaines. Nos cauchemars gravés dans notre chair. »

Tisseurs de Sorts: Ensorceleurs en série! (4)

Certainement trop long pour son propre bien, Tisseurs de Sorts est un passionnant roman de fantasy jeunesse qui sait jouer sur le sens moral de ses personnages et de son univers pour faire réfléchir son lecteur en même temps qu’il le divertit. Magique, tantôt inquiétant tantôt émouvant, le roman de Frances Hardinge n’est pas la franche réussite qu’on aurait souhaité mais saura néanmoins captiver les amoureux du genre.

Note : 7/10

Tisseurs de Sorts : Ensorceleurs en série ! (2024)

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Author: Ouida Strosin DO

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